Traitement des calculs rénaux

Au cours des 20 dernières années, les concepts de traitement médical et de prévention de la néphrolithiase ont considérablement évolué. Ils reposent sur une investigation étiologique systématique et indispensable pour chaque patient lithiasique. Elle comprend l'analyse du calcul et la recherche de facteurs de risque lithogènes à partir de données cliniques, radiologiques et biologiques. La nature des calculs a complètement changé au cours des 100 dernières années avec aujourd'hui une prédominance des lithiases oxalocalciques. Ce sont les changements d’habitudes alimentaires qui expliquent les modifications de la nature des calculs. L'investigation diététique représente ainsi un moment important dans l'investigation étiologique et la mise en œuvre de règles hygiéno-diététiques est indispensable pour prévenir le risque de récidive des calculs.

Habitudes alimentaires : L'enquête alimentaire doit renseigner sur les habitudes présentes plusieurs mois avant la découverte des calculs. L'enquête doit être basée sur des questionnaires de référence. Les données de cette enquête sont essentielles car les déséquilibres ou excès alimentaires et plus encore le manque d'alcool constituent les principaux facteurs de lithiase calcique primaire. Nature et type de boissons :

Boissons : L'absorption de boissons abondantes afin de diluer l'urine et de la ramener en dessous du seuil de cristallisation des sels de calcium est un principe fondamental dans la prévention des lithiase urinaire récurrentes. Il n’est pas toujours facile pour les patients de savoir quelle quantité d’eau potable ils peuvent consommer ; beaucoup d’entre eux ignorent les qualités ou les défauts de l’eau du robinet ou la différence entre l’eau de source et l’eau minérale. De même, les urologues, mal informés, s’en tiennent le plus souvent à des conseils généraux (« boire beaucoup »), en évitant de trop entrer dans les détails. Cependant, quelques règles simples, alliées à une connaissance minimale des différentes eaux, permettent de prodiguer des conseils efficaces.

Il existe différentes catégories d'eau :

Eaux minérales Toutes les eaux en bouteille ne sont pas minérales. Les eaux minérales sont des eaux qui peuvent se targuer de propriétés favorables à la santé, bénéficiant d'un caractère et d'une pureté originales, provenant d'eaux souterraines protégées de toute pollution, stables dans leur composition.

Pour certains, leur forte concentration en substances minérales leur confère des propriétés pouvant être bénéfiques pour la santé, dont ils peuvent profiter, comme de véritables « médicaments ». La consommation exclusive de ces eaux peut poser des problèmes dus à une minéralisation mal équilibrée (diarrhée, etc.).

Eau de source préconditionnée : Il s’agit d’une eau souterraine protégée de toute pollution, propre à la consommation humaine sans traitement ni ajout, et répondant à des exigences de qualité. L'eau de source se distingue de l'eau minérale naturelle par le fait qu'elle répond aux normes de consommation et qu'il n'y a pas de déséquilibre dans la concentration de ses minéraux. Il n’est pas nécessaire qu’il ait une composition minérale constante et caractéristique et il ne peut donc prétendre avoir des effets bénéfiques pour la santé. Approvisionnement public en eau Il s'agit soit d'eau souterraine provenant d'une source ou d'un forage, soit d'eau de surface provenant d'un pompage direct dans des rivières, des canaux, des lacs et des étangs.

Cette eau issue du réseau de distribution peut être traitée chimiquement (exemple : chloration) mais doit alors répondre à différents paramètres qui définissent les normes de consommation. La composition de l'eau du robinet est disponible et affichée en mairie et à la DDASS [6].

Quelle diurèse quotidienne ? Dans le cas des lithiases calciques courantes, le consensus universel est de maintenir une diurèse quotidienne d'au moins deux litres par 24 heures. Les boissons doivent être bien réparties lors du nycthémère avec notamment une consommation abondante de boissons au coucher et, dans les formes sévères, une nouvelle boisson à chaque lever de nuit. En effet, l'absence de dilution suffisante des urines émises pendant la nuit, se traduisant par une forte densité des urines au réveil, est une cause fréquente de récidive des calculs même si le volume de diurèse sur 24 heures est satisfaisant.

Il est donc important de contrôler, outre le volume des urines de 24 heures, la densité des urines du matin. Quel type de boisson conseiller ?

Des études épidémiologiques récentes ont montré que l'apport optimal en calcium chez les patients atteints de lithiase calcique est de 800 à 1 000 mg/jour. La viande, les légumes et les fruits, c'est-à-dire tous les produits non laitiers, apportent environ 200 mg/jour de calcium. Reste donc à assurer un apport de 600 à 800 mg de calcium par jour sous forme d'eau de boisson et de produits laitiers. La répartition entre eau de boisson et produits laitiers doit tenir compte des goûts et des habitudes du patient. En effet, la teneur en calcium de l'eau potable disponible en France varie de 5 mg/l pour les plus pauvres à 600 mg/l pour les plus riches. De même, la teneur en calcium des produits laitiers varie de 120 mg/100 g pour les moins riches (lait entier ou demi-écrémé, brie ou chèvre frais) à 1200 mg/100 g pour les plus riches (Emmental ou Parmesan).

Chez un patient préférant une eau très pauvre en calcium, un apport d’au moins 600 à 800 mg de calcium par jour doit être apporté sous forme de produits laitiers, au choix du patient. De même, pour un patient qui aime le fromage, nous recommandons de boire de l'eau pauvre en calcium. A l’inverse, chez un patient n’aimant pas les produits laitiers, une eau plus riche en calcium est recommandée pour assurer un apport suffisant en calcium. Expliquez au patient de vérifier les étiquettes sur les flacons.

Calcium : Un excès de calcium dans les urines de 24 heures (hypercalciurie) est retrouvé chez 25 à 60 % des patients atteints de calculs calciques selon les séries. Dans la genèse de cette hypercalciurie on retrouve : • des facteurs nutritionnels sur lesquels le thérapeute peut intervenir ; • facteurs non nutritionnels (génétiques, physiologiques, etc.). Trois nutriments influencent le flux de la calciurie : • l'apport en calcium (++) ; • apport en sodium (+) ; • apport en protéines (+++++).

Rappels sur le métabolisme du calcium Calcium : apports Le seul apport en calcium se fait par l'alimentation. L'apport moyen chez l'adulte est de 25 mmol/jour (soit 1 g). Le lait, les produits laitiers et l’eau potable sont les principales sources de calcium alimentaire. Les viandes, les fruits et les légumes verts sont pauvres en calcium. Il est peu probable que le calcium présent dans les aliments autres que les produits laitiers et l’eau soit absorbé. L'absorption digestive représente 20 % de la quantité ingérée (si celle-ci est normale), soit 5 mmol/jour (200 mg). Débouchés pour le calcium Le rein est le seul débouché possible pour le calcium. A l’équilibre, les pertes rénales sont égales à l’absorption digestive nette, soit 5 mmol/j. Exprimée par rapport au poids corporel, la calciurie est inférieure à 0,1 mmol/kg par jour quel que soit le sexe. Il existe des variations significatives de la calciurie même chez les sujets sains avec une distribution non gaussienne de valeurs qui s'échelonnent de 1,5 à 12,8 mmol/j. Environ 10 % des sujets sains ont une calciurie supérieure à 0,1 mmol/kg par jour

Enfin, la manière dont le calcium est consommé est importante : les suppléments de calcium consommés en dehors des repas augmentent le risque de lithiase, contrairement au calcium pris pendant les repas. Autres facteurs nutritionnels pouvant influencer la calciurie Consommation de sel Il existe une relation entre la natriurèse (quantité de sel dans l'urine) et la calciurie. Plus l’apport alimentaire en sodium est élevé, plus l’excrétion urinaire de sodium est élevée et plus la calciurie est élevée.

Ainsi, les patients sont hypercalciuriques pour un apport en sodium de 200 mmol/j (> 13 g/j) et ne le sont plus si l'apport est réduit à 100 mmol/j. Influence de l'apport en protéines (++++) On sait depuis longtemps que la consommation de protéines (animales : viande, poisson, volaille, œufs) est associée à une incidence accrue de lithiase urinaire calcique. Il existe une relation entre l'apport en protéines et la calciurie. Plus l’apport en protéines est élevé, plus la calciurie est élevée chez les hommes comme chez les femmes. Influence de l'apport en glucides sur les sucres rapidement absorbés, l'obésité et l'alcool Les sucres rapides, l'obésité et l'alcool conduisent à une résistance à l'insuline. Cependant, l'insuline réduit la réabsorption tubulaire du calcium. La consommation de sucres rapides est associée à un risque accru de lithiase.

Les fibres pourraient influencer la calciurie mais les données de la littérature ne permettent pas d'évaluer son importance. Au total, la calciurie est très influencée par l’alimentation, notamment en ce qui concerne les protéines, le sel et le calcium. Pendant longtemps, les patients atteints de lithiase calcique se sont vu prescrire un régime pauvre en calcium (400 mg/jour, ce qui excluait tous les produits laitiers). Ces régimes se sont révélés néfastes avec une aggravation de la maladie des calculs (augmentation de l'oxalurie) et une déminéralisation osseuse tandis que la calciurie diminuait de manière variable (problème d'observance, etc.).

On conseille aujourd'hui aux patients atteints de lithiase de consommer du calcium : « Ni trop ni pas assez » : ce qui correspond à un apport quotidien de deux ou trois produits laitiers. Hyperoxalurie L'hyperoxalurie est proportionnellement plus importante que l'hypercalciurie dans l'augmentation de la saturation urinaire mais elle est rare chez les patients atteints de calculs généraux.

L'oxalate est un acide terminal du métabolisme dont la seule voie d'excrétion est le rein. L'oxalate se lie au calcium pour former un complexe lithogène : l'oxalate de calcium. Apports d'oxalate Alimentation : cacao, thé, certains légumes et fruits rouges, fibres alimentaires.

Cet apport d'oxalate correspond à 10 à 20 % de l'oxalate urinaire. En effet, la quantité d'oxalate ingérée varie beaucoup d'un jour à l'autre (100 à 1 000 mg) et son absorption est également très variable. L'oxalate présent dans le tube digestif doit être sous forme libre pour être absorbé. Cette fraction libre est très dépendante de la teneur en calcium du bol alimentaire (+++). En effet, les complexes de calcium oxalent et bloquent son absorption. L'apport en calcium est peut-être l'élément nutritionnel le plus influent sur l'oxalurie. Cependant, il a été démontré qu’un régime très pauvre en oxalate pouvait réduire de moitié l’excrétion urinaire d’oxalate.

80 à 90 % de l'oxalate provient du métabolisme intermédiaire : synthèse hépatique d'oxalate qui dépend de la masse maigre (corrélation entre surface corporelle et oxalurie). Cette synthèse dépend d'une enzyme : l'alanine-glyoxylate aminotransférase (déficiente dans l'hyperoxalurie primaire de type I). L'oxalate sort de l'urine. Hyperuricurie L'hyperuricurie (excès d'acide urique dans les urines) est un facteur de risque métabolique de lithiase calcique car l'acide urique favorise la cristallisation de l'oxalocalcium.

L'hyperuricurie peut avoir deux origines : • l'alimentation, notamment l'apport de protéines carnées (protéines animales) et d'abats riches en glutamine, précurseur de l'acide urique ; • surproduction endogène (=goutte) ou élimination rénale excessive. Le citrate d'hypocitraturie est un petit acide organique omniprésent qui constitue une source d'énergie pour les cellules. Le citrate provient du métabolisme du glucose. Le citrate est filtré par le glomérule puis une grande partie est réabsorbée par les cellules tubulaires. Le citrate présent dans l'urine a la propriété d'inhiber la formation et l'agrégation de cristaux d'oxalate de calcium. En cas d'hypocitraturie, le risque de formation de calculs oxalocalciques est augmenté. La consommation de sel réduit la citraturie. Une faible diurèse conduit à une hypocitraturie. Les régimes alcalinisants (type végétarien) augmentent la citraturie tandis que les régimes riches en protéines de viande (qui fournissent des acides) font l'inverse.

Les régimes riches en fibres alimentaires ou en potassium (qui incluent une consommation élevée de fruits et légumes) augmentent la citraturie. Les causes contribuant à l'hypocitraturie idiopathique sont donc : • un faible volume urinaire ; • consommation excessive de sel ; • consommation excessive de protéines ; • faible consommation de fruits et légumes. Enfin, les agrumes (citron, orange) apportent du citrate. La prise d'un verre de jus d'orange de 200 ml est recommandée en cas de lithiase oxalocalcique.

Conclusions La mise en évidence des facteurs de risque de lithiase rénale permet de mettre en œuvre des mesures de « réadaptation alimentaire » (voir en annexe la fiche conseil à remettre aux patients et téléchargeable sur le site « Urofrance.org ») et, si nécessaire, un traitement médical. . Enfin, les succès obtenus par la lithotripsie extracorporelle et l'endourologie ne doivent pas faire oublier que la prévention des lithiases rénales est la meilleure arme contre les récidives.